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SIXIEME ANNÉE N°4929

 

142ème jour de l'année

   


Lundi
21
Mai 1897

 Le scandale des Folies-Bergère évité - 15 avril 1897

Le scandale
des Folies-Bergère évité

Une indisposition de commande.
Intervention du préfet de police. — Exhibition interdite

Le Gaulois — 15 avril 1897

Le Gaulois avait signalé avec une indignation légitime les débuts prochains, sur la scène des Folies-Bergère, de l'ex-princesse et nos confrères, convaincus comme nous du scandale formidable que cette exhibition devait fatalement soulever, nous avaient emboîté le pas. Notre juste appel a été entendu. La « débutante » ne débutera pas. Nous en sommes un peu la cause et nous nous en félicitons hautement. En cette circonstance, M. Lépine a droit à nos remerciements et nous les lui marchanderons d'autant moins qu'on sait que les fonctionnaires de la république nous donnent rarement l'occasion de les féliciter.

On lira plus loin à la rubrique du « Courrier -des spectacles » la note officielle que le théâtre des Folies-Bergère nous a adressée pour nous faire savoir que l'ex-princesse ne débutait .pas ce soir sur la scène de la rue Richer.

Cette note nous montre la débutante empêchée par un état maladif d'une certaine gravité. Il y est question d'influenza, de fièvre intense, de complication pulmonaire. A la vérité, et fort heureusement pour l'héroïne en cause, sa santé est excellente et les raisons pour lesquelles les amateurs de scandales ne. la verront pas ce soir sont à un ordre-tout à fait différent.. Les voici dans toute leur simplicité.. Hier matin, M. Marchand, directeur des-Folies-Bergère, était appelé chez le préfet de police, qui lui demandait officieusement de renoncera faire débuter celle qui sur l'affiche devait porter le nom de l'ex-princesse.

Le scandale, prétendait le préfet, serait extraordinaire et des renseignements qui lui étaient fournis, il ressortait que la débutante serait huée, qu'une foule de gens s'étaient procurés des sifflets à roulette et qu'on lui jetterait à la face des lapins vivants, des pelures de pommes de terre et d'autres objets innommables.

M. Marchand répondit au préfet qu'il redoutait autant que lui ce scandale et que si la « débutante » consentait à renoncer à ses projets de paraître sur son théâtre,  il s'en montrerait fort heureux pour sa part. D'ailleurs il craignait si fort les manifestations brutales qu'il avait interdit qu'on servit aucune consommation dans la salle et qu'il avait fait supprimer les petits bancs et les lorgnettes automatiques.

— Puisque vous partagez mon avis lui, dit le préfet, voyez l'ex-princesse, et tâchez qu'elle ne soit pas hostile à nos sages projets.

» D'ailleurs, je vais la convoquer pour ce soir, six heures, et je vous prie de revenir à mon cabinet à la même heure. »

Puis, congédiant M. Marchand, le préfet ajouta :

— Allons, je commence à croire que nous parviendrons peut-être à éviter tout scandale.

A six heures précisés, M. Marchand arrivait à l'hôtel du boulevard du Palais, où, depuis un quart d'heure, la débutante l'avait précédé. L'héroïne fut reçue la première. Le préfet fit valoir à ses yeux les motifs les plus sérieux qui devaient la détourner de s’exhiber à la foule. Comme la « débutante » semblait ne pas goûter ces raisons et qu'elle prétendait avoir le droit de débuter, le préfet lui fit comprendre qu'il ne voulait prendre officiellement aucune mesure vexatoire avant la représentation, mais que si celle-ci était scandaleuse, ce qui était absolument certain, il se verrait dans la nécessité cruelle de sévir en fermant le théâtre où elle aurait eu lieu et en invitant peut-être la «débutante » a quitter le territoire français — mesure qu'il la suppliait de ne pas l'obliger à employer.

Puis, très amicalement, très paternellement, M. Lépine insista sur des questions d'ordre privé.

Il fut éloquent et persuasif, car à six heures et demie précises, l'ex-princesse, très émue, renonçait à paraître sur la scène des Folies-Bergère.

Ce début à sensation n'aura donc pas lieu, et le scandale que nous redoutions et qui eût été plus formidable que nul ne peut le soupçonner, est heureusement étouffé.

La Presse a quelquefois du bon !

*
*      *

En quittant l'hôtel du Palais, Mme Clara Ward est rentrée à son hôtel, où à peine installée, elle a reçu la visite d'un médecin, elle n'a pas eu de peine à jouer le rôle de malade qui doit expliquer au public sa décision de ne pas paraître aux Folies, car elle était effectivement souffrante.

Le docteur a indiqué l'ordonnance suivante:
Prendre par jour, en deux ou trois fois, deux à trois cuillers à potage de la potion suivante, diluée dans un verre de tisane de mauve :

    Acétate d'ammoniaque 15 gr
    Alcool de racine d'aconit 30 gouttes
    Sirop de codéine 100 gr.
    Eau de fleurs d'oranger 40 gr.

Mme Clara Ward n'a pas décidé encore si elle resterait à Paris ou si elle repartirait pour Berlin, où des offres brillantes lui sont faites par la Belle-Alliance, un music-hall renommé sur les bords de la Sprée.

Ce que nous savons, c'est qu'aujourd'hui même l'héroïne de ce petit roman doit aller poser chez un de nos grands photographes dans le costume suggestif qu'elle devait endosser aux Folies-Bergère.

Enfin, cette tragédie finit heureusement en opérette Mme Clara Ward renonce au théâtre, en France du moins, et rentre ainsi dans la vie privée. Nous n'avons plus à nous occuper d'elle, et nous espérons bien qu'il en sera toujours ainsi.

Ajoutons que Mme Clara Ward qui s'est sagement abstenue d'envoyer du papier timbré au Gaulois aurait moins sagement décidé d'en adresser à un de nos confrères.

Maubersac

 DRAME ÉTRANGE

DRAME ÉTRANGE

TENTATIVE D'ASSASSINAT SUR UN PRÊTRE

Le coup de couteau de Mlle Pépé — Folie mystique et chantage — Un guet-apens — En portant les saintes huiles — La coupable en fuite.

Monomanie mystico-criminelle accompagnée d'accès hystériformes, diront les médecins appelés à examiner cette femme qui, dans sa maturité maladivement exaspérée, a tenté de tuer, hier matin, un vicaire de l'église Saint-Médard. Et ce cas n'est pas unique. On se souvient de cet infortuné et charitable abbé de Broglie, de ce saint homme qu'une « vieille garde du bigotisme » — on nous pardonnera certainement cette expression — assassina il y a quelques années parce que, après s'être dérobé à ses avances passionnelles, il lui avait finalement refusé l'absolution.

Qu'ils soient du village ou de la ville, les prêtres, des hommes après tout, sont souvent l'objet de ces amours bizarres où la spiritualité se mêle à la charnalité, de ces passions écloses dans des âmes à la fois simples et tourmentées de vieilles filles, de ces postulations qui, malgré qu'elles s'élèvent jusqu'à l'Homme-Dieu étendu sur sa croix, s'accrochent à la soutane du prêtre qui sert ce Dieu et le matérialise en quelque sorte sur la terre. Un vicaire attaché à une grande paroisse de Paris nous disait hier, à propos de l'assassinat commis sur la personne de son collègue de Saint-Médard :

— Tous les jours, nous avons à nous défendre contre de pauvres femmes, des malades évidemment, dont les sentiments religieux, au lieu de monter vers le Dieu de Justice et de Miséricorde qui gouverne l'univers, s'arrêtent à nous. Ces manifestations d'amour prennent souvent pour nous des formes extrêmement gênantes, et certains de mes collègues pourraient vous dire que leur existence s'est trouvée empoisonner pendant de longues années par les démonstrations aussi compromettantes que persistantes de leurs ouailles. C'est principalement parmi les femmes du peuple, les domestiques, les ouvrières, ces pauvres créatures dont les sentiments se trouvent comprimés par la servitude, que se manifestent les turpitudes sentimentales dont nous ne pouvons souvent nous délivrer qu'en refusant l'absolution à celles qui y sont en proie. Au grand amour que ces malheureuses professaient pour nous succède bientôt la haine, et la haine entraîne Bientôt la vengeance.

En effet, l'abbé Émile Ménard, le vicaire de Saint-Médard auquel nous avons fait allusion plus haut, parait avoir été victime d'une vengeance de cette nature, précédée de tentatives de chantage.

Le coup de couteau.

L'abbé Ménard quittait son église vers neuf heures et demie du matin pour aller porter tes derniers sacrements à une pauvre femme qui, agonisante, avait fait demander les secours de la religion. Il se dirigeait vers la rue Claude-Bernard, où habitait la moribonde, quand, arrivé au carrefour formé par les rues Monge et de Bazeilles, une femme d'une quarantaine d'années, portant une toilette grise et coiffée d'un chapeau suranné à plumes rouges, s'avança à sa rencontre. Elle s'arrêta, laissant l'abbé Ménard passer devant elle et le foudroyant d'un regard haineux.

Le vicaire de Saint-Médard avait à peine fait quelques pas que l'inconnue s'élançait sur ses traces, dans un mouvement furibond, et le frappait d'un coup de couteau dans le dos. Puis, satisfaite de son acte, elle pirouettait sur ses talons et s'enfuyait bientôt à toutes jambes par les rues du Fer-à-Moulin et de la Collégiale.

Quoique blessé assez, grièvement, l'abbé Ménard ne trébucha point ; au contraire, faisant un effort sur lui-même, il continua sa route avec la volonté d'arriver à temps pour accomplir son ministère ; mais, chemin faisant, ses forces le trahirent un peu, et il dut songer à regagner son domicile, 20, avenue des Gobelins.

Un chiffonnier, nommé Gustave Cochoneau, avait été témoin de la tentative de meurtre accomplie sur l'abbé Ménard ; celui-ci, se sentant frappé, avait même dit au porte-hotte, en lui désignant la femme qui fuyait « Faites arrêter cette malheureuse; elle vient de m'enfoncer quelque chose dans le dos. » Cochoneau s'était bien mis à la poursuite de la femme, mais cette dernière, quand elle s'était trouvée une centaine de mètres du théâtre du drame, avait apporté une telle précipitation dans sa fuite qu'il fut impossible de la rejoindre. Rentré chez lui, l'abbé Ménard refusa de se coucher tant qu'un autre prêtre de la paroisse ne serait pas venu chercher les saintes huiles et l'hostie consacrée qu'il avait emportées de l'église Saint-Médard. Il attendit une demi-heure l'arrivée de ce prêtre, ne faisant entendre aucune plainte en dépit des souffrances qu'il endurait, et, quand son collègue arriva, il lui dit simplement :

— Une folle m'a frappé d'un coup de couteau alors que j'allais porter le viatique à une mourante. Je crois que l'arme est restée dans ma blessure.

Et c'était vrai.

Stoïcisme d'un prêtre.

L'abbé Ménard retira lui-même le couteau de la plaie, un long couteau de cuisine à manche noirci et dont la lame mesurait environ quinze centimètres. Aussitôt, une abondante hémorragie se produisit et le prêtre s'évanouit entre les bras des siens. La blessure était si profonde que le malheureux abbé eût sans doute succombé à la perte de son sang si le couteau n'eût arrêté lui-même l'hémorragie.

La famille du prêtre fit appeler le docteur Le Marignier, qui, après avoir constaté la gravité de l'état de la victime, prit toutes les mesures préservatoires en vue de prévenir un dénouement fatal. On fit alors avertir le docteur Michaud, médecin à l'hôpital de la Pitié, qui jugea indispensable une opération des plus graves. M. l'abbé Émile Ménard est âgé de trente-huit ans, et il est vicaire à Saint-Médard depuis huit ans. C'est un homme d'une constitution très vigoureuse en apparence, mais sujet à de fréquents malaises provoqués par le mauvais état de son estomac. Dans l'espoir de recouvrer complètement la santé, il était parti pour la campagne aux premiers beaux jours et était rentré à Paris le 25 septembre.

M. Thuillerie, commissaire de police du quartier du Jardin des plantes, avait été informé du drame par le chiffonnier Cochoneau. Celui-ci avait même remis au magistrat une espèce de cache-corset ou de châle en soie noire que la femme avait jeté sur la chaussée après avoir frappé l'abbé Ménard. Cette étoffe parait avoir servi à envelopper le couteau.

M. Thuillerie se rendit aussitôt avenue des Gobelins pour interroger le prêtre blessé. Il apprit de la bouche même de l'abbé Ménard le nom de la femme qui l'avait frappé. Cette énergumène; cette folle est une demoiselle une vieille demoiselle nommée Augustine-Léontine Pépé, âgée de quarante-deux ans environ.

L'odyssée d'une femme galante.

Augustine Pépé est née à Nantes où vit encore sa mère; elle a six sœurs et deux frères. Une de ses sœurs a fait un excellent mariage à Paris ; deux autres habitent Montmartre où elles se livrent au commerce de la… galanterie. Les trois plus jeunes sont en province où elles suivent l'exemple de deux dernières.

La demoiselle Pépé est arrivée à Paris, il y a une douzaine d'années. Elle fit bientôt la connaissance d'un M. C… boursier, avec lequel elle vécut, pendant sept ans, dans un appartement luxueux situé rue Hippolyte-Lebas, à l'angle de la rue des Martyrs. M. C... voulant se séparer de sa maîtresse vers la fin de l'année 1893, lui loua, 4, rue de Mirbel, un modeste logement de 480 francs par an, au premier étage. Il lui acheta un mobilier complet et lui annonça que, pendant deux ans, il lui servirait une pension de 200 fr.par mois, mais qu'ensuite elle aurait à se suffire à elle-même, Et, pendant ces deux années, Mlle Pépé, qui se faisait aussi appeler Mme Cuzin, vécut en bonne petite rentière.

L'ancienne concierge du n« 4 de la rue de Mirbel, Mme Nef, que nous avons vue à son nouveau domicile, 40, avenue des Gobelins, nous a fourni ces renseignements curieux :

« — Mlle Pépé était un peu excentrique, quoique fort douce et très aimable personne. Tous les jours elle allait à la messe et se levait parfois à six heures du matin pour se rendre à Saint-Médard.

» Cet excès de religion de la part d'une femme dont la moralité était, en somme, assez douteuse me sembla bien extraordinaire. Je voulus en avoir le cœur net et je lui demandai un jour :

« — Alors vous êtes bigote, mademoiselle Pépé ?

» — Mais non, me répondit-elle, je n'y crois pas à toutes leurs farces, mais il y a un vicaire qui est si gentil, qui prêche si bien et qui a une voix si douce et si plaintive quand il chante, que je ne sors jamais de l'église sans être profondément émue. »

» Plusieurs fois elle me reparla de son vicaire; mais je ne croyais pas que son amour pour lui irait jusqu'à l'assassinat. » Quand M. C... cessa de servir à son ancienne maîtresse sa pension mensuelle, Mlle Pépé tomba dans une misère noire, et elle dut chercher, sa subsistance quotidienne dans des amours passagères. Très brune, elle se teignit en rousse, et, toutes les nuits, amenait rue de Mirbel des amants de hasard qui faisaient du scandale. Les voisins se plaignaient, et le propriétaire donna congé à sa locataire, qui, d'ailleurs, devait deux termes.

Au mois d'avril dernier, Mlle Pépé dut quitter son logement; ses meubles furent vendus par autorité de justice; elle doit encore 110 francs au propriétaire qui lui retient une malle, laquelle se trouve actuellement dans une chambre vide, au cinquième étage, 4, rue de Mirbel.

De Pépé en Coquard.

La demoiselle Pépé se rendit alors à Nantes, auprès de sa mère, écrivit à son ex-propriétaire une lettre lui annonçant qu'elle allait dégager sa malle et rentra à Paris au mois d'août.

Le 14 août, elle louait, sous le nom de Mme Coquard, pour une somme de 120 fr. par an, une chambre située au sixième étage, 6, rue Rataud: Elle annonça que ses meubles allaient bientôt lui être expédiés de Nantes. Elle emménagea simplement un lit en fer qu'elle avait loué chez un brocanteur du quartier et un carton à chapeau, lequel contenait toute sa garde-robe. La concierge du numéro 6 de la rue Rataud nous a déclaré à son tour :

« — Mme Coquard ne me disait rien de bon au point de vue de la solvabilité; elle causait quelquefois avec mon mari, lorsqu'elle sortait, le matin, à dix heures, ou lorsqu'elle rentrait, le soir. Elle paraissait douce et était toujours très polie.

» Une dame vint un jour nous, demander de ses nouvelles; elle nous apprit que le véritable nom de cette femme était Augustine Pépé, qu'elle avait eu d'heureux jours, mais nous apprîmes d'autre part qu'elle avait été mandée chez M. Lanet, commissaire de police, pour une affaire de chantage. Nous ne nous doutions certes pas que la misérable tenterait, un beau matin, d'assassiner M. l'abbé Ménard. »

A la préfecture de police et au parquet, on fournit des renseignements déplorables sur Augustine Pépé. Au cours de la présente année, elle a dû être mandée, à plusieurs reprises, dans divers commissariats de police pour « intervention, officieuse ». L'ancienne fille de joie essayait de faire chanter les jeunes gens riches ou les hommes mariés, ce qui ne l'empêchait point de faire montre d'une religiosité excessive et de se rendre tous les jours à l'église Saint-Médard pour prier saint Antoine de Padoue.

Les lettres.

Augustine Pépé remarqua bientôt l'abbé Ménard qui fit par la suite une grande impression sur son esprit.

Elle hésita longtemps avant de lui écrire, se contentant d'assister à ses messes, de suivre ses sermons puis un jour elle adressa à l'abbé une lettre que celui-ci déchira. Afin de se rapprocher de lui, elle le demanda à son confessionnal, mais le vicaire, déjà prévenu contre cette femme, ne voulut point l'entendre et il l'adressa à l'un de ses confrères.

Furieuse, Augustine lui envoya un papier sur lequel elle avait dessiné un Pierrot avec ces mots :

« C'est le printemps ; tout s'éveille dans la nature. Resterez-vous donc éternellement sourd aux plaintes d'une pauvre pécheresse ? »

Puis les envois de toute nature continuèrent. Quand elle fut dans la misère ses lettres devinrent plus pressantes. Elle racontait à l'abbé Ménard que, grâce à son éloquence, Dieu était enfin descendu en elle; mais elle ne manquait jamais de lui demander de l'argent « pour sauver son âme et protéger son corps ».

Dans une de ces missives, elle disait :

« Au saint-office, vous affectez de regarder les jeunes filles qui se .sont placées près de vous avec intention et vous ne jetez jamais sur moi un regard de pitié. Malheur à vous ! »

Puis ses épîtres devinrent menaçantes. Elle écrivait « Prenez-garde à vous il ne suffit pas d'aimer la Vierge Marie pour qu'un homme s'acquitte de la dette d'amour qu'il a contractée envers la femme ! » Augustine Pépé disait dans une autre missive : « Vous ne m'épargnez aucun outrage. Ainsi, votre père a passé devant chez moi l'autre jour; il a affecté de se décrotter sur mon trottoir. Je suis la plus malheureuse de vos amantes en Dieu ! »

Ou encore :

« Envoyez-moi cent francs, sinon, ce soir, j'irai me jeter à l'eau ; mais avant, je vous tuerai. »

Tout cela était signé, tantôt Angélina, tantôt femme C., ou bien Augustine Pépé, Coquard, Un amateur de la vertu, Une Madeleine éplorée, etc.

Les lettres de la folle, longues au début, étaient devenues très brèves ces temps derniers. Elles ne contenaient plus que des demandes d'argent et des menaces. Ce sont celles qui ont été saisies par M. Thuillerie. M. l'abbé Ménard détruisait les autres au fur et à mesure qu'il les recevait, non sans en avoir donné lecture aux vicaires de Saint-Médard pour les mettre en garde eux-mêmes contre les tentatives d'Augustine Pépé.

20, avenue des Gobelins.

M. l'abbé Ménard habite au numéro 20 de l'avenue des Gobelins, au second étage, en compagnie de son père, de sa mère et de sa sœur. M. Ménard père est président du conseil de fabrique de l'église Saint-Médard.

L'un des frères de l'abbé Ménard est caissier au journal l'Illustration. Lorsque nous nous présentons au domicile de' la victime on nous dit que l'abbé vient de subir une terrible opération qui a bien réussi et qu'il dort. De nombreux prêtres, des habitants du quartier se succèdent dans la loge du concierge. Les intimes sont admis dans la chambre du patient et prient autour du lit. Mgr le cardinal Richard, archevêque de Paris, a envoyé prendre des nouvelles du blessé.

L'opération était des plus délicates elle a été faite par un chirurgien de l'hôpital de la Pitié, assisté d'un interne et de M. le docteur Le Marignier.

L'abbé Ménard a été endormi et l'on a dû pratiquer la résection d'une partie de l'intestin, qui avait été perforé.

Le couteau, à manche noir, acheté la veille chez un coutelier de la rue du Faubourg-Saint-Honoré, près de l'église Saint-Philippe du Roule, a été saisi. La lame avait pénétré tout entière dans les reins du malheureux prêtre.

Un vicaire de la paroisse de Saint-Médard, que nous rencontrons chez la victime, nous dit :

« M. l'abbé Ménard dort mais on ne peut se prononcer sur son état. Il est bien malheureux, qu'il n'ait pas prévenu M. le curé des poursuites dont il était l'objet. Moi, dernièrement, j'ai dû avoir recours aux bons offices de M. Thuillerie contre une femme qui me poursuivait dans l'église, qui parlait et causait du scandale tout simplement parce que je n'avais pas voulu lui accorder un secours.

» Souvent nous recevons des lettres de gens qui font appel à notre bourse ou à notre influence. Or parmi ces gens se trouvent des individus qui ne méritent aucune pitié.

» M. l'abbé Ménard s'était ouvert à moi et m'avait parlé des tentatives de chantage dont il était l'objet. Il ne voulait pas faire du scandale ni commettre l'imprudence qui coûta la vie à M. l'abbé de Broglie en recevant chez lui cette femme qu'il ne connaissait pas, à laquelle il n'avait jamais parlé. Je lui avais conseillé de prévenir le parquet il n'a pas voulu le faire.

» M. l'abbé Ménard est une victime du devoir. Il a été frappé au moment où il accomplissait son saint ministère, et, s'il n'a pu se défendre, c'est qu'il portait sur lui le saint viatique et qu'il ne pouvait ni se retourner, ni se défendre, ni appeler, car vous n'ignorez pas que les prêtres ne peuvent causer lorsqu'ils traversent les voies publiques portant l'hostie sacrée : ils ne doivent se laisser distraire par rien de ce qui peut se passer autour d'eux.

» M. l'abbé Ménard est un prêtre très aimé de ses paroissiens et très estimé dans le quartier mais mon jugement à moi pourrait vous paraître partial. Adressez-vous aux voisins et ils vous diront, mieux que je ne pourrais le faire, combien est bon cet excellent abbé et combien l'odieux crime commis ce matin soulève de réprobation. »

En fuite.

Qu'est devenue Augustine Pépé ? On l'ignorait encore hier soir, à une heure extrêmement tardive. Cette femme, cette folle, cette hallucinée, doublée d'une criminelle, n'a point reparu chez elle. Elle s'est enfuie dans la direction de la Seine, et peut-être bien qu'elle s'y est jetée. L'instruction de cette très curieuse affaire a été confiée à M. Bastid.

Le Matin — 2 octobre 1897

L'actualité dramatique

 Le drame de la place des Vosges

Le drame de la place des Vosges.

C'est à un sentiment de jalousie rétrospective qu'a obéi M. François Béchet, ouvrier bijoutier, demeurant, rue Saint-Martin, en cherchant à attenter aux jours de M. Louis Portal, courtier en vins, domicilié, 19, place des Vosges.

M. Portal, qui est âgé de trente-cinq ans et est très connu Bercy, où sa profession l'appelle quotidiennement, est marié depuis deux ans environ et père d'un bébé de quelques mois. L'appartement qu'il occupe, place des Vosges, est des plus luxueux; il paie, d'ailleurs, un loyer annuel de six mille francs. Il parait qu'avant de convoler en justes noces, M. Portal aurait entretenu d'intimes relations avec une de ses petites cousines, mariée depuis à M. Béchet. Sa conduite à l'égard de la jeune femme aurait même été des plus incorrectes. Bref, hier matin, vers huit heures, on sonnait fébrilement à la porte de l'appartement de M. Louis Portai. Ce lut la bonne qui vint ouvrir à l'obstiné carillonneur. M. Portal, s'il vous plait, demande le matinal visiteur.

— Monsieur est encore couché, répondit la bonne, et il ne reçoit d'ailleurs personne avant neuf heures. Si vous voulez vous présenter à cette heure-là, monsieur vous recevra.

— Je suis très pressé et ne puis attendre. J'ai une très importante commande à faire et je suis persuadé que, si vous faites part à votre maître du but de ma visite, il me recevra aussitôt.

En même temps le visiteur sortit un portefeuille de sa poche et en tira une carte de visite portant le nom suivant: « François Béchet, ouvrier bijoutier. »

La bonne prit la carte qui lui était tendue et alla prévenir M. Portal. Quelques secondes après, elle revenait, priant M. Béchet d'attendre quelques instants. M. Portal passa à la hâte son pantalon et une jaquette et vint au-devant de son prétendu client.

— Je vous prie de m'excuser, lui dit-il, de vous avoir fait attendre; vous désireriez, m'a-t-on dit, faire, une commande de vins.

— Oui, déclara M. Béchet qui, regardant alors bien en face le négociant en vins, lui dit: « C'est bien à M. Portai lui-même que j'ai l'honneur de parler ? »

— A lui-même, répondit simplement le négociant.

Béchet s'arma alors de son revolver et fit feu à trois reprises sur le courtier en vins M. Portai fut atteint au bras gauche, le second projectile l'effleura au côté droit et la troisième balle ne fit que lui enlever un petit lambeau d'oreille.

M. Portai conserva son sang-froid il courut à sa chambre à coucher et prit son revolver pour riposter à l'agression dont il venait d'être victime. Quand il revint dans son antichambre, François Béchet avait disparu. Dans sa précipitation, celui-ci avait laissé chez le courtier en vins son chapeau et son revolver.

M. Carlier, commissaire de police du quartier de l'Arsenal, prévenu du drame qui venait de se dérouler, se rendit au n° 19 de la place des Vosges, et saisit l'arme et la coiffure du meurtrier.

En même temps- M. Carlier télégraphiait au service de Sûreté et des agents de M. Cochefert étaient aussitôt envoyés à la recherche de l'ouvrier bijoutier.

D'ailleurs, on n'eut pas la peine d'arrêter François Béchet; il vint lui-même se constituer prisonnier dans l'après-midi au service de Sûreté.

Il résulte de l'enquête à laquelle s'est livré M. Cochefert, que l'ouvrier bijoutier n'ignorait pas les relations ayant existé jadis entre M. Portai et sa femme. Celle-ci, au cours d'une scène de jalousie, aurait même avoué à son mari qu'elle aimait toujours le courtier en vins. D'où la colère de François Béchet.

Bref, les causes de ce drame sont tellement délicates, que nous n'y insisterons pas davantage.

Les blessures de M. Portal sont peu graves. Quant à l'ouvrier bijoutier, il a été gardé à la disposition de la justice.

Le Matin — 14 avril 1897

 Une femme pauvrement vêtue --- P13

Une femme pauvrement vêtue, ayant un bébé dans ses bras, tombait évanouie, avant-hier soir, sur l'avenue des Gobelins. A la pharmacie où on la transporta, on reconnut qu'elle s'était empoisonnée avec du phosphore. Après avoir reçu des soins, elle a été conduite à l'hôpital Cochin.

Cette malheureuse, qui se nomme Marie Ollivier, est âgée de vingt-sept ans. Fille de cultivateurs aisés de la Bretagne, elle suivit à Paris un voyageur de commerce. Il y a huit mois, elle devint mère. Son amant l'avait abandonnée le mois dernier, la laissant sans ressources. Mourant de faim, menacée d'être expulsée de la chambre qu'elle occupait rue de Patay, la pauvre femme résolut de se tuer.

On pense pouvoir la sauver.

Le Figaro - 24 août 1897

 RAFLE DE VAGABONDS

RAFLE DE VAGABONDS

Un charmeur de rats

La Sûreté a opéré l'avant-dernière nuit une rafle parmi les vagabonds qui cherchent un abri sous les ponts. Quarante-cinq individus ont été arrêtés. Sous le pont des Arts, les agents se sont livrés à véritable chasse à l'homme pour s'emparer des vagabonds abrités dans les ferments servant de soutien au tablier du pont. Pour ne pas tomber dans la Seine, les malheureux qui passent la nuit sous ce pont s'accrochent avec leur ceinture et leurs bretelles. Lorsqu'ils ont vu les agents, ils se sont sauvés d'arche en arche pour gagner l'autre rive, mais des agents les y attendaient et les ont capturés au fur et à mesure de leur arrivée.

Parmi les individus arrêtés se trouve un type très curieux, un nommé Émile Schwartz, âge de quarante ans, qui est sans domicile depuis vingt ans. Schwartz qui parcourt la France à pied, de village en village, est un barnum d'un nouveau genre. Il montre des souris blanches et des rats, qu'il loge sur sa poitrine, au-dessus de la ceinture de son pantalon. En même temps que lui, les agents ont amené à la Sûreté ses pensionnaires. Une odeur insupportable due aux croûtes de fromages avariées et aux fruits gâtés dont Schwartz nourrissait rais et souris, s'échappait des poches du vieux vagabond.

Quand on a fouillé Schwartz, les inspecteurs durent sortir de leur asile rats et souris et les déposer à terre. Chose curieuse, aucun de ces animaux ne se sauva et tous se groupèrent autour de leur maître. Ils attendirent derrière la porte du cabinet de M. Cochefert que leur maître sortit de chez le chef de la Sûreté.

Schwartz a été remis en liberté hier matin, et il a quitté la Sûreté avec ses rats et ses souris, qui y avaient trouvé un asile momentané.

Le Gaulois — 10 septembre 1897

Dans l'actualité du ...

 19 janvier

Mardi
19 janvier

M. Méline, président du conseil offrira, le 13 février prochain, au ministère de l'agriculture un dîner, qui sera suivi do réception, aux présidents des Chambres et à ses collègues du cabinet.


M. Henry Boucher, ministre du commerce, présidera lundi prochain, dans la salle de la Société de géographie, la troisième des conférences de l'Union coloniale française, faite par M. L. Grandeau sur l'agriculture aux colonies


La Société française de secours aux blessés militaires, dont le général duc d'Aumale est le président, ouvrira jeudi prochain 21 courant, trois heures, la série de ses conférences et de ses cours, à son siège central, rue Matignon, 19.


Mme Félix Faure et Mlle Lucie Faure ont visité, hier matin, à onze heures, l'hôpital des enfants tuberculeux, rue La Boétie. Elles ont fait une abondante distribution de jouets et de gâteaux, et ont entendu le compliment d'une fillette qui leur a remis une gerbe de fleurs.


Si le docteur Grenier, le député musulman de Pontarlier, ne trouve pas l'eau de Paris assez pure pour faire ses nombreuses ablutions, nous lui conseillons d'avoir recours à l'Eau de Saint-Galmier, la plus limpide des eaux de table.


Les Contes de la Primevère, par le nouvel académicien André Theuriet, sont empreints de ce charme intime et pénétrant qui a fait la vogue du célèbre auteur des récits forestiers. Ils paraissent chez l'éditeur Fasquelle en un volume de la Bibliothèque Charpentier.


Alerte au café de la Paix.

Le café de la Paix, situé, comme on sait, au coin de la place de l'Opéra et du boulevard des Capucines, loue actuellement au photographe Pirou l'une de ses salles, où se donnent chaque soir des séances de cinématographe.

Cette salle est située dans l'arrière-café, sur le boulevard.

Hier soir, vers onze heures moins le quart, quatre-vingts personnes environ assistaient au spectacle, quand, soudain, par suite du contact de deux fils électriques, une flamme jaillit et communiqua le feu à des tentures. Bientôt, l'incendie se communiqua aux boiseries et au plafond.

Une légère panique se produisit parmi les spectateurs ; mais heureusement, grâce au sang-froid du personnel de l'établissement, la salle fut évacuée rapidement et sans incident. Un monsieur seulement a perdu son chapeau, qui a été retrouvé piétiné près de la porte.

Les garçons du café avaient à peu près éteint le feu quand les pompiers du marché Saint-Honoré sont arrivés avec une pompe à vapeur et tout leur matériel de sauvetage.

Les dégâts sont relativement peu importants.

La venue de la pompe à vapeur avait naturellement attiré sur le boulevard une foule énorme.

M. Cornette, commissaire de police du quartier Saint-Georges, a dû, organiser un service d'ordre pour maintenir les curieux à distance.

A minuit la place de l'Opéra avait repris son aspect habituel.

sans titre 1
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A. ALLAISLe bon mot
d'Alphonse Allais

 Je ne connais rien de plus agréable que pisser. Si j'étais riche, je pisserais tout le temps.


295. En décembre 1897, M. Rambaud était ministre de l’instruction publique et des Beaux arts et défendait son budget à la Chambre.
Les variations tout à fait extraordinaires de la température actuelle réveillent bien des indispositions que l'on croyait finies avec l'été. De même qu'en août, on boit n'importe quoi, et l'on paye cher cette insouciance. Il serait si simple de ne jamais oublier la reine des eaux de table, la délicieuse eau de Saint-Galmier, dont la réputation demi-centenaire survit à toutes les concurrences, grâce à ses vertus reconnues.
 Trio avorteur

LE TRIO AVORTEUR

(Le jeune officier,
sa sœur, sa maitresse)
par

Gaston LEROUX

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 la bombe du mystère

La bombe du mystère

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L'affaire du lac Saint-Fargeau

Le cadavre d'un individu paraissant âgé d'une cinquantaine d'années était découvert, hier après midi, au milieu de hautes herbes, dans un terrain vague situé 68, avenue Gambetta, au coin de la rue Pelleport. Le défunt était couvert de sang ; il portait au sein gauche une large blessure faite par un instrument tranchant.

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Le boa de la rue du Sentier

Un serpent boa, né au Sénégal l'année derniers et échoué à Paris par suite de circonstances que nous racontons plus loin, s'est permis, hier, une petite fugue qui n'a pas été sans causer quelque émotion dans un des quartiers les plus commerçants du deuxième arrondissement.

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 VOULOIR, C'EST POUVOIR - l'univers illustré 1895

VOULOIR, C'EST POUVOIR

Ce qu'on souhaite bien toujours se réalise :

Un muet désirait acheter du Congo,

Savon qu'il savait pur et de douceur exquise ;

Il fil un effort tel qu'il prononça ce mot.

Un témoin, au Savonnier Victor Vaissier.

Nouvelles à la main

La conversation roule sur l

La conversation roule sur l'escrime, et on énumère les hommes d'épée célèbres.
On cite tour à tour Vigeant, Mérignac, Pini, Rue, etc.
Béthisy, qui n'a encore rien dit: °
— Damoclès… dont l'épée est encore légendaire !...

 Le pharmacien de la petite ville

Le pharmacien de la petite ville de n'a voulu confier à personne le soin de traiter sa belle-mère dangereusement malade

— Eh bien ! lui demande un voisin, comment va la bonne dame ?

— Je viens de lui flanquer une potion qu'aucun médecin de Paris n'aurait osé lui administrer.

Deux jours après, lettre de faire part.

 Le jeune vicomte de La Panne est en âge

Le jeune vicomte de La Panne est en âge de faire une fin. Une vieille amie de sa famille lui propose de le marier.
— Je veux bien, dit notre viveur à bout de ressources et de forces, mais il me faudrait une petite femme bien douce, bien tranquille, bien sage, bien...
— Compris, interrompt la vieille dame avec un sourire quelque peu ironique, il vous faut une femme de tout repos.

 ̃Bonnes amies

Bonnes amies

— Comment faites-vous, ma chère, pour défier ainsi les années ? C'est tout à fait surprenant vous ne vieillissez… plus.

 Les deux adversaires se rendant

Les deux adversaires se rendant au lieu de rendez-vous dans le bois de Vincennes, se rencontrent au guichet de la gare de la Bastille.

X... demande un billet aller et retour.

― Vous êtes donc bien sûr de revenir ? dit Z... narquois.

— Absolument sûr.

— Alors je vous fais des excuses, poursuit Z... subitement radouci.


Echos et nouvelles

 Et la pluie continuait de tomber

Et la pluie continuait de tomber !

Depuis que le pluviomètre à l'usage des observatoires a été inventé, c'est-à-dire depuis plus de deux cents ans, il ne s'est jamais rencontré, paraît-il, un mois de septembre aussi mouillé qu'en l'an de grâce 1897.

Aussi les météorologistes sont fort embarrassés d'expliquer ce phénomène. Songez donc que l'observatoire de la tour Saint-Jacques a enregistré dans l'après-midi d'hier, de midi à trois heures seulement, 10 millimètres d'eau ! Cela représente une moyenne de 100 mètres cubes d'eau par hectare.

On essaye de nous consoler en nous rappelant le souvenir de journées plus désagréables encore, celle du 10 septembre de l'année dernière, par exemple, qui, par suite d'une trombe, de funeste mémoire, nous gratifia de 50 millimètres d'eau dans le court espace de deux heures et demie. Mais toutes ces consolations ne valent pas un bon parapluie !

Le Gaulois — 7 septembre 1897

 Le développement du cyclisme - sept. 1897

Le développement du cyclisme

Le cyclisme se développe chaque jour davantage dans notre pays, ainsi que tout le monde peut s'en convaincre. Mais on n'a pas de notions précises sur les proportions qu'a prises ce nouveau mode de locomotion. Le ministère des finances vient précisément de nous fournir à cet égard des indications en quelque sorte mathématiques, par le relevé qu'il a fait des produits de l'impôt sur les vélocipèdes et des fluctuations annuelles qu'a subies cet impôt. Les résultats que le fisc a constatés sont curieux et méritent d'être signalés.

Le nombre des vélocipèdes soumis à l'impôt se trouvait être au 1er janvier 1897 de 329,816 pour toute la France. C'est le chiffre le plus récent qu'on ait pu constater, car l'année actuelle étant en cours et comportant, outre les rôles du début, des rôles supplémentaires, les statistiques s'y rapportant ne pourront être connues qu'en fin d'exercice.

Pour l'année 1895 on n'avait taxé que 256,084 vélocipèdes et pour l'année 1894, 203,026. On voit combien la progression est rapide. Elle s'accusera encore plus cette année.

L'impôt a produit, durant l'année 1896, la somme de 3,272,339 francs.

II est curieux de voir comment ce nombre de 329,816 vélocipèdes se répartit entre les départements. C'est naturellement celui de la Seine qui vient en tête avec 62,892 vélocipèdes.

Viennent ensuite : Seine-et-Oise, 14,343 vélocipèdes; Nord, 10,386 Seine-et-Marne, 9,085 Seine-Inférieure, 8,227; Gironde, 7,985; Marne, 7,672 Oise, 7,375 Aisne, 5,973 Somme, 5,379, etc.

Tels sont les dix premiers départements par ordre d'importance.

Les départements qui ont le moins de vélocipèdes sont les suivants: Corse, 98 Lozère, 137 Hautes-Alpes, 320 Haute-Loire, 377; Basses-Alpes, 402; Cantal, 404, et Ariège, 546.

Paris, à lui seul, paye environ le cinquième du produit total de l'impôt, soit 626,916 francs.

Le Figaro - 3 septembre 1897

 La traction par ballon - 1897

La traction par ballon

Amateurs de sensations émouvantes, réjouissez-vous !
Il devait être réservé à cette fin de siècle de voir ce spectacle assurément peu banal.. Après la traction par la vapeur, par l'air comprimé, par l'électricité, voici qu'on va essayer la traction par ballon, non pas en Amérique, le pays des inventions excentriques, mais dans notre vieille Europe, en Bavière, et cela avant la fin de l'année.
Il s'agit d'un chemin de fer de montagne partant de Bad-Reichenhall et destiné à conduire les touristes au sommet du Hochstauffen.

Au lieu d'être remorqué par une locomotive à crémaillère, comme au Righi par exemple, le train, composé de deux ou trois wagons, sera " enlevé " par un ballon de vingt mètres de diamètre ayant une force ascentionnelle de cinq mille kilogrammes.

La ligne, d'une longueur de deux kilomètres et demi environ, est formée d'un rail unique sur lequel roulent les voitures aériennes, maintenues verticales et traînées à la fois par l'aérostat. Pour la descente, il suffit de charger dans la nacelle une quantité déterminée de lest qui, servant de contrepoids, ne permet au ballon d'utiliser que la force exactement nécessaire pour combattre l'effet de la pesanteur et prévenir une dégringolade dangereuse.

APL 19 décembre 1897

 CHRONIQUE DE L'ELEGANCE

CHRONIQUE DE L'ÉLÉGANCE

Au point de vue culinaire les mœurs françaises se sont complètement transformées depuis un demi-siècle. La coutume de servir un grand nombre de plats à chaque repas est absolument démodée et même dans les maisons les plus opulentes on a absolument proscrit l'ordonnance ancienne des deux potages, relevé, quatre entrées, double rôti et entremets variés.

On trouve odieux la station prolongée à table et il faut que le service soit promptement achevé. Un dîner qui se prolongerait au delà de trois quarts d'heure serait déclaré insupportable et nous pouvons constater qu'à bien peu d'exceptions près, notre génération s'applique à manger le moins possible. Même on remarque que depuis quelques années l'engouement pour les viandes noires a beaucoup diminué.

Les hommes jeunes et très robustes seuls leur donnent encore la préférence on les défend aux enfants et aux estomacs débiles. Un plat d'œufs, une viande chaude, une viande froide, légumes et salades, un entremets de pâtisserie si l'on veut, tel est le menu habituel des déjeuners dans les maisons les mieux tenues. Un potage, un relevé, une entrée, un rôti chaud, un rôti froid, salade, légumes et plat doux, des fruits, peu ou point de bonbons, voilà pour le dîner lorsque l'on est nombreux, et l'on ne songe même pas, en dehors des grands dîners de cérémonie, à changer le menu si l'on reçoit plusieurs personnes en supplément à sa table. Le vrai luxe consiste à présenter de très grosses pièces, viandes, poissons, volailles ou gibier abondant. En revanche, la cuisine est extrêmement soignée, on est horriblement difficile et le rôti arrosé et cuit à point, les jus savoureux, les assaisonnements délicats sont à chaque repas l'objet des observations d'une maîtresse de maison qui connaît ses devoirs envers ses hôtes. Les détails du service sont très recherchés. 

Le Gaulois — 25 septembre 1897

 La carte de visite postale

La carte de visite postale.

Les employés des postes de Paris viennent de recevoir la carte de visite annuelle du directeur et des fonctionnaires des postes de New-York, à tous leurs confrères de l'union postale universelle.

La carte de cette année, comme les précédentes, forme un aimable souvenir artistique. Mais elle est cette fois de double grandeur et revêt à peu près la forme des cartes postales avec réponse payée.

Sur les côtés de l'adresse l'écusson des États-Unis en couleur, avec, au centre, le sceau spécial en or du bureau de poste de New-York. Au-dessous, dans un encadrement d'or, l'inscription suivante, avec le millésime 1897 en gros chiffres.

« Les directeurs et les fonctionnaires de la poste de New-York ont-offrent à leurs collègues de l'union postale universelle leurs meilleurs souhaits .de bonne année, »

Sur le deuxième feuillet, les noms du directeur et du haut personnel postal.

Le Gaulois - 7 janvier 1897

 La visite du président de la Rép

La visite du président de la République à l'hospice des vieillards de Boulogne

Le président de la République, accompagné général Tournier, des commandants Humbert et Legrand et de M. Le Gall, a quitté, hier, l'Élysée, à deux heures vingt, pour inaugurer le nouvel hospice des vieillards de Boulogne sur Seine.

Reçu au milieu des fleurs, des drapeaux et des vivats par le ministre de l'intérieur, les présidents du conseil municipal de Paris et du conseil général, les préfets de la Seine, de-police, MM. Poirrier, sénateur; Rigaud, député; Escudier, Peyron, etc., M. Félix Faute a répondu aux allocutions de M. Jochum, maire de Boulogne; Gervais et de Selves, par la remise de la rosette d'officier de l'instruction publique à M. Jochum, des palmes académiques à MM. Chevalier, secrétaire de la mairie de Boulogne, Gionnier professeur à l'Association philotechnique, et de la croix du Mérite agricole à MM.. Vidal-Beaume et Chartier.

Au cours de la distribution des médailles d'honneur, l'un des médaillés, vieux garçon de chantier, comptant plus de trente ans de services, voulait absolument, dans sa joie, embrasser lé président.

― On ne donne l'accolade, lui a fait observer M. Félix Faure, que lorsqu'on remet la Légion d'honneur nous verrons plus tard.

La visite de l'hospice a commencé par les dortoirs des  femmes, s'est poursuivie par les bâtiments réservés aux hommes, les cuisines, la machinerie, et s'est terminée par les réfectoires, dans l'un desquels un lunch avait été servi.

M. Gervais, président du conseil générale a porté un toast à la santé du président de la République, qui s'est  retiré, très acclamé, ainsi que M. Barthou.

Le Matin ― 18 mars 1897

Le Journal de 1897

Le journal de 1897 et des environs doit être vu avec un exploreur prenant en charge la mise en colonnes.
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Les textes en ligne sont des reflets de la société française de la fin du XIXème siècle. La question est : "le Monde change-t-il vraiment ?".

                 Bonne lecture

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